Lutte contre l’Hépatite B : Intensifier le dépistage, la vaccination et rompre la chaîne de transmission mère-enfant
L’hépatite virale, de manière générale, est une inflammation aiguë ou chronique des cellules du foie, pouvant entraîner à long terme une cirrhose ou un cancer de cet organe. L’hépatite virale peut être aiguë (moins de 6 mois d’évolution), ou chronique au delà de 6 mois.
Selon le rapport 2024 de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le nombre de décès imputables à l’hépatite virale est en constante augmentation. Cette maladie est la deuxième cause de décès dans le monde, avec 1,3 million de morts par an. Chaque jour, l’hépatite B ou C tue 3 500 personnes dans le monde.
Une maladie à multiples causes
Dr Djenabou Diallo, maître assistante en hépatogastroentérologie à la Faculté des Sciences et Techniques de la Santé de l’Université Gamal Abdel Nasser de Conakry, et médecin au service de médecine interne hépatogastro de l’Hôpital National Donka, explique que l’hépatite virale est causée par cinq types de virus :
Le virus A, responsable de l’hépatite A ;
Le virus B, à l’origine de l’hépatite B ;
Le virus C, provoquant l’hépatite C ;
Le virus D ou Delta ;
Le virus E, à l’origine de l’hépatite E.
En Guinée, une prévalence inquiétante de l’hépatite B :
En Guinée, l’hépatite B reste prédominante, représentant un grave problème de santé publique avec une prévalence allant de 8 à 19 % selon certaines études parcellaires (nous ne disposons pas d’enquête nationale) , bien au-delà de celle du VIH, qui est de 2 %.
Modes de transmission de l’hépatite B
Dr Djenabou Diallo identifie trois modes principaux de transmission dans le contexte guinéen :
1. De la mère à l’enfant
« Lorsqu’une femme enceinte est porteuse de l’hépatite B, elle peut souvent transmettre le virus à son enfant, soit pendant la grossesse si la charge virale est élevée, soit lors de l’accouchement, en cas de contact avec les liquides biologiques ou le sang, surtout lors d’un accouchement difficile », explique-t-elle.
2. Par voie sexuelle
Selon Dr Diallo : « Une personne atteinte d’hépatite B peut contaminer ses partenaires lors de rapports sexuels non protégés, surtout si ces derniers ne sont pas vaccinés. »
3. À travers les objets tranchants
Le risque de transmission est élevé lorsque des objets personnels tels que rasoirs, coupe-ongles, lames ou peignes sont partagés. « Le virus de l’hépatite B peut survivre jusqu’à 8 jours à l’air libre, augmentant ainsi le risque de contamination en cas de blessure ou d’effraction cutanée », ajoute-t-elle.
Symptômes et complications
L’hépatite B reste asymptomatique pendant longtemps. Cependant dans certains cas il existe des manifestations cliniques dans la phase aiguë, simulant un paludisme ou une grippe: on peut avoir la jaunisse (coloration jaune des yeux), des urines foncées, des maux de tête, des démangeaisons, des douleurs articulaires, une perte d’appétit, une fatigue générale, des vomissements parfois et une fièvre.
Au stade chronique (après 6 mois), la seule manifestation clinique demeure la fatigue avant la survenue des complications graves (après plusieurs années d’évolution) comme la cirrhose et ses complications telles que: la jaunisse, l’eau dans le ventre (ascite), les pieds que enflent, les vomissements du sang et à un stade avancé le cancer du foie.
Les défis en Guinée
Dr Diallo déplore que la lutte contre l’hépatite B reste difficile en Guinée malgré les progrès en matière de diagnostic et de traitement. Elle explique : « Les taux de dépistage, de vaccination et de traitement demeurent faibles, même si les outils et les prix se sont améliorés. »
Recommandations pour accélérer l’élimination de l’hépatite B
Face à cette menace croissante, Dr Djenabou Diallo propose des actions concrètes :
Intensifier les campagnes de sensibilisation, de dépistage et de vaccination de masse.
Rendre le dépistage systématique pour les femmes enceintes et les enfants.
Sensibiliser la population pour la réalisation du bilan prénuptial en intégrant de façon systématique le dépistage de l’hépatite B.
Sensibiliser sur l’importance des rapports sexuels protégés et l’utilisation exclusive des objets personnels.
Subventionner les services médicaux et faciliter l’accès aux traitements.
Inscrire dans le budget national un fonds dédié à la lutte contre l’hépatite.
Ces mesures contribueraient significativement à lutter contre cette maladie et s’aligneraient avec l’objectif de l’OMS d’éliminer l’hépatite B et C d’ici 2040, notamment en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud-Est.
Morlaye KÉÏTA
610-120-805