Prévention médicale : quels enjeux pour la Guinée ?

Malgré les réformes entreprises par le Ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique, via le Service National de Promotion de la Santé (SNPS), la promotion de la santé et l’efficacité de la prévention médicale en Guinée demeurent confrontées à des défis majeurs. Parmi ceux-ci figurent le changement comportemental au sein de la population et le manque d’informations propices à la prévention médicale. Pour remédier à ces problèmes, le Dr Mamadou Moustapha Sow exhorte les communautés à adopter des comportements favorables à la santé et appelle les professionnels de santé ainsi que les médias à une implication et à des initiatives accrues.

La promotion de la santé, à travers l’information, l’éducation et la sensibilisation, la promotion des comportements favorables à la santé est un moyen efficace pour accroître la participation des communautés aux actions sanitaires et créer des environnements propices à une meilleure prévention médicale. Cependant, plusieurs obstacles persistent :

1. Faible intérêt de la population pour les informations sanitaires

Selon des observations de terrain effectuées par nos reporters, la majorité des citoyens est davantage attirée par des informations à caractère politique, culturel, sportif ou sexiste, au détriment des sujets sanitaires. Cette réalité entrave les actions de promotion, d’éducation et de prévention médicale menées par le SNPS et les efforts de communication des médias.

Depuis l’élaboration du plan stratégique de promotion de la santé, en passant par la formation des acteurs au niveau central et déconcentré, la cartographie des médias et des ONG œuvrant dans le domaine de la santé, jusqu’à la formation des professionnels de la presse et de la société civile en matière de communication pour le changement de comportement, le SNPS s’efforce, conformément à sa politique nationale, de mettre en place des mécanismes visant à changer les comportements au sein des familles et sur les lieux de travail. « En misant sur la prévention, nous économisons davantage en activités et en ressources financières », explique le Dr Mamadou Moustapha Sow, chef d’unité au SNPS.

Il déplore toutefois que, malgré les efforts déployés pour informer, éduquer et sensibiliser la population sur les bons comportements en matière de santé, « le Guinéen ne lit pas et, même à la radio ou à la télévision, il préfère suivre des informations politiques ou culturelles ».

Ainsi, il invite la population à « être à l’écoute des acteurs de la santé. Lorsqu’on est bien informé, sensibilisé et éduqué, cela contribue au maintien et à la préservation de la santé. Avec les bonnes informations, vous pouvez vous-même éviter des complications ou prévenir une maladie, par exemple. Pour ce faire, nous collaborons étroitement avec la presse, les points focaux communication et promotion de la santé et les acteurs de la société civile pour fournir à la population des informations relatives aux interventions menées par le Ministre de la santé et particulièrement à la prévention médicale », souligne-t-il.

2. Manque d’ouverture des professionnels de la santé envers la presse

En Guinée, les journalistes spécialisés en santé rencontrent de nombreuses difficultés lors de la collecte et du traitement d’informations liées à la santé. Parmi ces obstacles :

Réticence de certains professionnels : De nombreux médecins, qu’ils soient spécialistes ou généralistes, refusent de répondre aux demandes d’interviews destinées à des articles ou émissions éducatives et de sensibilisation en santé.

Lenteur dans la collaboration entre journalistes et professionnels de santé : Souvent, les négociations pour obtenir un entretien prennent une à deux semaines avant d’aboutir.

À ce sujet, le Dr Sow Moustapha explique : « La santé reste un domaine très hiérarchisé ; certaines communications nécessitent des accords hiérarchiques à obtenir. Parfois, c’est par crainte pour leur position que certains refusent de communiquer. Cela peut également découler d’un manque de confiance en soi et de la peur d’être contredit. » Il encourage donc les professionnels de santé à être plus coopératifs et réceptifs aux demandes d’interviews des journalistes afin de mieux servir la population.

3. Manque d’implication et d’initiatives au sein de la presse

« Je ne nie pas l’importance de sa contribution dans la promotion de la santé et de la prévention médicale, mais la presse guinéenne doit redoubler d’efforts en créant davantage de contenus diversifiés en ce sens. Il est essentiel de consacrer plus de temps et d’espace de diffusion aux informations de santé dans leurs productions, à travers des émissions dans toutes les langues et la diffusion de spots publicitaires. »

Il est important de noter qu’en Guinée, il existe peu de structures médiatiques spécialisées en santé et que, dans les organes généralistes, la santé est souvent reléguée au second plan, derrière la politique, la culture et le sport.

Pour une prévention médicale efficace en Guinée, il est également nécessaire d’envisager :

L’élargissement des programmes d’éducation, d’information et de sensibilisation au sein des écoles à travers la santé scolaire, des universités, des lieux de travail et de loisirs.

Une subvention dédiée à la presse, en particulier celle spécialisée en santé, pour favoriser et faciliter l’information de masse.

La création d’organes médiatiques publics spécialisés en santé.

Une coordination multisectorielle pour la prise en compte de tous les déterminant de la santé.

 

En adoptant ces mesures, la Guinée pourra renforcer la promotion de la santé et améliorer enfin la prévention médicale au sein de sa population.

 

Morlaye Kéïta

610-12-08-05